De Salzbourg

Vendredi 3 août 2018

1°) Les pays de forêts et d’eau

3 000 kms nous séparent de la dernière fois où nous avions écrit ici.
Cette pause dans cette ville autrichienne de toute beauté est bienfaisante et réconfortante.
Notre voyage touche à sa fin et il aurait été injuste de ne pas raconter tous ces derniers jours pour tous ceux qui n’ont ni Facebook, ni WhatsApp et pour nous-mêmes également. Il restera le billet final du bilan pour clore ce chapitre de nos vies.
Les nouvelles alarmantes de Vieille Maman nous ont décidé à poser le choix de rentrer. Parfois c’est le cœur qui parle le plus fort …
Alors nous avons pris le ferry aux Lofoten pour Bodo sur le continent.

 

 

 

 

Une traversée rêvée avec les montagnes plongeant dans la mer. Et puis, nous avons roulé et encore roulé, chaque jour.
Descendant la Norvège, traversant les Alpes du pays par des cols râpés battus par le vent et la pluie, les fjords noyés de brouillard, nous arrivons en Suède et le soleil revient avec une chaleur dont nous avions oublié l’existence. Autour de Kiruna les incendies ont fait rage et nous apprenons que les Samis sont inquiets pour leurs troupeaux. Les éleveurs de rennes ont des cheptels allant de 4 000 à 8000 bêtes. Les rennes se nourrissent l’hiver du lichen qu’ils vont chercher sous la neige. Les lichens, avec les arbres, ont brûlé et il faudra une trentaine d’années pour qu’ils repoussent.
Les éleveurs se demandent où trouver le fourrage pour le long hiver. En Suède, nul ne se rappelle avoir vécu de telles chaleurs, tout comme une telle quantité de neige cet hiver. Un homme nous a dit qu’il y avait eu 1m60 et sur un bord de route nous avons vu une montagne de déblaiement, neige et terre mêlée qui malgré les 35° n’avait pas fini de fondre, l’équivalent d’un immeuble de 4 étages, c’est dire !

De ces deux pays de forêts et d’eau nous n’avons finalement qu’un bref aperçu pour nous permettre un jugement définitif. Il faudrait y vivre des saisons et des saisons pour apprendre, comme pour tous les pays d’ailleurs. Pourtant, si nous avons littéralement adoré la Finlande et son art de vivre, Norvège et Suède aux très beaux paysages nous ont laissé froids. Dans l’imaginaire, nous les pensions très pointus sur l’écologie, l’environnement, l’hygiène, tout çà, tout çà, mais pléthore de détritus en tous genres existe ici aussi hélas. Les supermarchés rivalisent d’utilisation de sac et emballages en plastique, les poubelles de villes n’existent pas et canettes, mégots sont bien là pour le rappeler.
Les petites bourgades sont épargnées et sont très coquettes avec leurs maisons colorées et les jardins tondus au cordeau.

 

Chasseur de baleine devant son trophée!

Nous avons pris l’option du ferry qui traverse depuis la Suède jusqu’à Rostock en Allemagne. Pas de Danemark donc et après tous ces mois de voyage nous savons qu’il ne faut pas avoir de regrets sur ce qui ne se fait pas. Et si l’enthousiasme m’a fait défaut ces derniers jours, il reste encore, et pour tous les deux, l’élan de la découverte.


Cette traversée nocturne en ferry fut vraiment éprouvante. Plus de cabine disponible, nous pensions trouver, au moins, des fauteuils légèrement inclinables comme dans tous les ferry pris jusqu’alors.Et non, rien, nous avons gouté au confort hollandais (compagnie du bateau), un lounge aux raides fauteuils sans dossier coincés entres des tables vissées au sol et une cafeteria avec le panneau -no sleeping area-. Nous étions une trentaine dont 4 motards tchèques venus suivre une conférence théologique à Uppsala et qui rentraient chez eux. Bien déconfits, et plutôt mal que bien nous nous sommes tous installés pour une très courte nuit. Je me suis rappelée mes 18 ans quand j’étais partie au Cap Nord et qu’avec toi, Hélène, nous dormions par terre n’importe où !


Et la route a repris en Allemagne maintenant. Nous passerons par l’Autriche pour ne pas retrouver les axes infernaux de Hambourg-Brème-Düsseldorf comme celui de Nuremberg-Stuttgart où sur des dizaines de kilomètres les camions sont cul à cul avec les bouchons incessants dus aux travaux.

Vous pouvez zoomer, c’est alcool frei !

Heureusement que nous ne sommes pas des œufs!

J’aime beaucoup l’Allemagne. Les villages tous propres aux maisons massives, solides et si fleuries. Et les Biergarten sous les marronniers où l’on mange à l’ombre de la cochonaille arrosée d’une bière légère!
A l’étape d’hier soir, nous avons rencontré des routiers. Faut dire que leur parking était juste à côté d’où nous logions. Des slovènes, des roumains, des tchèques, un hongrois. Quel métier ! Ils sont passionnés et sillonnent l’Europe avec une belle entraide et solidarité entre eux.
Karlman un routier hongrois et gipsy a offert sa tournée et dire que déjà je peinais à finir mon verre…


Lui qui a bourlingué partout ne connaissait pas Nevers pour l’avoir traversé mais pour sa botte nous disait-il en mettent le doigt entre les deux yeux. Et quand nous avons évoqué la transsibérienne et Irkoutsk, il nous a interrompu et a évoqué Michel Strogoff ! Etonnant!
Avec trois mots d’anglais, trois mots d’allemands nous avons refait le monde puis, sur une solide poignée de mains après avoir écrit le lieu de rassemblement des Saintes Marie de la Mer où il ira sûrement un 15 août prochain, chacun a repris sa route, eux pour dormir dans leur camion, nous à l’hôtel.
Ainsi vont les chemins. Cette solidarité entre routiers ressemble un peu à celle des motards. Sur la route, nous nous saluons tous, aux arrêts nous nous garons ensemble, et chacun s’intéresse à l’autre, à son voyage. Finalement la langue n’est pas un obstacle infranchissable, même en Russie d’ailleurs.
De ces rencontres éphémères qui jalonnent un long voyage, il ne reste pas grand-chose, parfois une photo, parfois le souvenir de rires et parfois une émotion que l’on garde précieusement au fond de soi.

2°) Bonjour l’Autriche

Et voilà, nous sommes à Salzbourg que nous avons déjà visité il y a 17 ans lorsque nous étions allés vivre cette concentration irréelle de motards organisée par BMW à Garmisch-Partenkirchen. Un plaisir renouvelé.

Rien de mieux que des vielles pierres pour trouver de la fraîcheur.

Vive les gargouilles modernes !

La maison de W. A. Mozart

On a retrouvé les coréens!
La ville a même construit une passerelle pour que les amoureux accrochent leurs cadenas …

Photo ou vélo sans cadre?

Des couvertures sur les arbres, faudrait pas qu’ils prennent froid!

Le Petit Prince regardant passer les avions?
Tout va bien, Pierre a les clefs.

Pieta de Anna Chromy (1999)
Inspiré par « Don Juan » de Mozart, la pièce de théâtre « Jedermann » d’Hofmannsthal et de la phrase « dans un soupir… je sens l’âme s’échapper… »
La coquille vide est comme un symbole de ce qui nous survit : l’amour que nous avons donné, les œuvres que nous avons créées, les souffrances que nous avons endurées.

Les nouvelles de France sont meilleures, nous restons deux jours pour du repos si nécessaire puis en reprenant le route par Innsbruck et Berne nous arriverons à destination.
Pas de p’tite rubrique « ce que nous avons aimé, pas aimé » Parce que décidément il fait bien trop chaud pour écrire davantage et nous sommes épuisés de longues journées avec blousons, casques, et lourd pantalon sous le soleil implacable. Nous pouvons vous certifier que la couleur noir capte la chaleur! Nous nous surprenons à réaliser que nous résistons bien mieux au froid de la Sibérie du début du voyage qu’aux chaleurs de la Suède, de l’Allemagne et de l’Autriche aujourd’hui.

3°) N’importe quoi? Insolite ou historique

Drôle de fromage!

Toilettes suédoises genrées.
En toute transparence !

Clin d’œil à notre village.

Vive les gargouilles modernes !

Des couvertures sur les arbres, faudrait pas qu’ils prennent froid!

Un tunnel? Non, un parking.

En tout cas, merci encore et toujours de vos courriels, ils nous vont droit au cœur.
Je laisse la place à mon merveilleux pilote pour qu’il intègre les photos. A lui aussi, ici, je dis merci de nous conduire avec une telle sagesse et prudence sur ces Chemins du Monde.

 

Au Nord du Cercle Arctique

1°) de Sallatunturi (Finlande)

Mercredi 11 juillet 2018

« Que faites-vous durant cette pause, perdus dans ce chalet en Laponie ? »
« Rien, voilà, rien. »

Nous sommes absolument seuls, aucun contact avec les gens du cru vivant au village à 10 km de là, si ce n’est les brèves échanges marchands. Et oui, il faut pourvoir au ravitaillement !
 

 

L’occasion de découvrir le nâkkileipa pour de vrai. On connait tous ce pain des pays nordiques sous les noms de Cracotte ou de Wasa. Ici on dit du crackpain. Ici, c’est le pays des baies, myrtilles et airelles, les gens cueillent, cueillent et nous, empotés, ne trouvons rien ! Ont-ils des endroits secrets, comme chez nous pour le muguet ou les girolles ?

Le penseur des rondins!
Z’avez vu le taon au milieu de la photo?

Et gouter au karsjalanpiirakka (il est long ce mot à transcrire mais à prononcer, allez-y !), c’est une galette fourrée aux pommes de terre, carottes et au renne. Et oui, parce que ça se mange aussi le renne, autant que la vache chez nous (qu’on nous dit que c’est du bœuf).
 

Faut avouer que c’est encore plus délicieux de les voir se promener devant le chalet, nonchalamment et sans vraie crainte. Un peu farouches, ils se laissent tout doucement approcher et quand vous êtes à les toucher, hop, ils filent en deux bonds.

Bon, tu te pousses, qu’on puisse sortir.

 

Le temps est chaud, le ciel bleu et les petites balades nous conduisent dans la forêt, dans les aiguilles de pins qui craquent sous les pieds, les sentiers serpentent au bord du lac, passent devant les maisons en rondins, pas de clôtures ni de palissades, encore moins de grilles.
 

 
Les motoneiges sont garées, les saunas en intérieur et les jacuzzis en extérieur attendent la neige abondante et le retour des propriétaires.

Ça, c’est un jacuzzi d’extérieur.
Ça, c’est le tri !
Sauna champêtre?
Ben non!

C’est le silence strié du bourdonnement incessant des taons et des moustiques. Parfois un bivouac avec son chapeau pointu, ses bancs et son âtre au milieu.
 

 

Je touche des fleurs douces et duveteuses comme du coton. Merci Hélène ma botaniste pour reconnaitre la linaigrette des marais et m’apprendre que les trolls en font des réserves pour l’hiver.

Les Trolls ne doivent pas être loin!

 

Nous n’avons pas croisé en chemin les trolls de ce pays, sûrement sont-ils moins nombreux qu’en Norvège où les rennes sont-ils trop nombreux et les auraient-ils piétinés ? Ben non, les trolls ce sont des géants, ils ne risquent rien !

Au-dessus du lac on voit bien les remonte-pentes du ski, il y a même deux pistes noires. C’est amusant parce qu’on apprend que tunturis veut dire collines et ici, elle est haute de 470 mètres ! On dit qu’il y a 700 tunturis en Finlande. Ski de piste, nordique, de fond, raquettes, motoneiges, traîneaux tirés par les rennes, par les huskys sans oublier le Père Noël qui habite à 100 km d’ici à Rovaniemi, on imagine sans peine la foule des passionnés des joies hivernales et quand on voit le nombre de chalets clos l’été, l’hiver la vie humaine doit battre son plein. Les chemins de motoneige sont même jalonnés de réverbères !
 

Pour l’heure c’est le chaud été et nous savourons ce qui s’apparente à une retraite de silence et de repos et c’est parfait, même s’il n’y fait jamais nuit.

Nous n’avons pas vu les aurores boréales parce qu’il faut de la neige. En effet, ce sont les renards polaires qui balayent cette neige avec leur queue touffue pour que cette poussière magique s’envole dans le ciel. Belle légende perpétuée par le peuple Samis !

2°) des îles Lofoten (Norvège)

Jeudi 19 juillet 2018

« Il ne faut pas de tout pour faire un monde, il faut du bonheur et rien d’autre »

C’est ainsi, le cœur rempli de joie que nous quittons la Finlande qui nous a conquis, ses rennes promeneurs aux larges sabots à la démarche pataude, ses 200 000 lacs chatoyants sous le soleil et ses forêts boréales silencieuses.

 

 

 

 

Nous effleurons la Suède pour la traverser et arriver en Norvège.
 

 

Parce que choisir les Lofoten, c’est un peu magique et même si, ici, il faut penser à prendre des élastiques parce que les billets s’envolent, le lapis-lazuli de l’eau, les nuages bas qui s’effilochent sur les flancs des montagnes et celles-ci qui chutent dans la Mer de Norvège valent bien les désagréments du porte-monnaie.

Filet à provisions ou provisions enfilées?
Bon! Ils sont où déjà les vêtements de pluie?

On est là pour notre plaisir !
Bien esseulée elle aussi!

Aujourd’hui il pleut, il fait froid, mon cœur est empli d’inquiétude et de peine à la nouvelle de l’hospitalisation des vieux parents. Mais Jean-Luc est avec moi…

Nous allons prendre la route du retour. D’abord attendre le ferry de dimanche qui nous déposera à Bodo, refiler en Suède et changer les pneus de la moto à Lulea. Ils deviennent dangereux pour notre sécurité, ils nous ont porté si fidèlement durant ces milliers et milliers de kilomètres qu’il serait bien inconscient de croire que nous pourrions arriver à bon port sans incident.

Et ainsi, par le Danemark, l’Allemagne, l’Autriche et la Suisse (Marc et Catherine vous nous accueillez ?) nous serons autour du 20 août chez nous puis … c’est un autre voyage…

Les Lofoten

Incroyable archipel au nord du cercle polaire arctique, entre ciel et mer, celle de Norvège et le Vestfjord. On dit qu’ici l’hiver n’est pas très rigoureux et que l’été, le thermomètre ne monte guère au-dessus de 15°. (68° latitude nord).  Nous sommes arrivés sous le déluge, 9°, brouillard et hallebardes. Voilà une nouvelle occasion de ressortir vêtements chauds et vêtements de pluie. Gardons le moral, essentiel, je crois dans un si long voyage…
 

 

 

 

Après deux jours de pluie incessante, le soleil est là et alors, savourons. Aujourd’hui encore, aux Lofoten, vit une population de pêcheurs-paysans. Au large, la pêche est abondante et assurée de janvier à mars. On pêche la morue skrei dont la période de frai dure trois mois. Ces bancs de poissons attirent les pêcheurs de Tromso et d’ailleurs, c’est ainsi que l’on a construit partout dans l’archipel des fiskevaer (port de pêche) avec des baraquements en bois peints en rouge sur pilotis appuyés sur les appontements, les rorbuer.
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Un rorbu est conçu pour des équipages jusqu’à douze hommes et, aujourd’hui, en dehors de la saison hivernale de pêche, beaucoup sont restaurés, rendus confortables et loués à prix d’or aux touristes durant la période estivale. Le nôtre est sommaire, aux vitres sales, à la propreté douteuse à prix pharaonique norvégien, mais nous sommes au bord du fjord, au bord de l’eau…

Si la morue est encore mise sur des séchoirs en bois, les hjellers, pour être séchée à l’air libre, puis mise en salaison, elle est de plus en plus congelée et préparée sur place dans chaque petit port.

On prépare ainsi les filets, l’huile et les rogues (œufs des femelles prisés par les pêcheurs bretons pour la pêche de la sardine) qu’on mélange aussi à du beurre et qui est vendu en tube, comme le fromage et la confiture.

De Ballstad à Svolvaer la grande ville, à Henningsvaer, aux plages de sable blanc de Haukland, Utakleiv, quand il fait beau, la balade à moto ne devrait être que plaisir.

Mais nous sommes d’affreux sauvages et devant l’afflux écrasant des camping-cars envahissant les minuscules routes menant aux plages, s’installant devant les merveilleux points de vue, garés comme des sardines et bouchant le port (!), nous n’avons qu’une envie, fuir plus haut, plus loin.
Si l’état parfait des routes en Scandinavie permet ces hordes de camions-maison, j’en viens à prier pour que jamais les routes de Russie, de Sibérie, ne soient améliorées, parce que la splendeur de la taïga, du Baïkal en seraient irrémédiablement gâchée.
C’est un coup de gueule pas vraiment tolérant, pardonnez-moi, et vu les prix hôteliers, comme ceux de la nourriture dans les supermarchés, l’afflux des camping-cars aux soutes bourrées de provisions n’est pas prêt de se tarir.
Curieuse expérience de la nature sauvage confrontée à la sauvagerie du consumérisme.

En conclusion, les Lofoten, c’est un grand oui, sans doute hors saison, mais une certitude nous restera en mémoire, la saisissante beauté des paysages.

Ce que nous avons aimé :

  • La paix et la quiétude de la Finlande
  • Les montagnes vertes et écorchées qui tombent dans la mer en Norvège

  • Les eaux turquoise, vertes ou noires au gré du ciel qui déteint.
  • Le ravissement du regard où la surprise se cache derrière chaque virage.
  • En leitmotiv, photographier n’importe quoi.
On a bien fait de s’arrêter sur les 20 cm de goudron qui nous restaient!

 

ça au moins c’est du tag artistique!
Y’a pas que le Slip Français! Y’a aussi …

 

 

 

Peaux de renne en peau de mouton
Cueille airelle

Ce que nous n’avons pas aimé :

  • Les prix scandinaves et surtout norvégiens. Après la Russie, le choc est rude !
  • Voir un camping-car de la taille d’un bus 50 personnes prendre tout le parking du port et n’en voir sortir que 3 personnes.

A bientôt pour notre retour sur le continent. Merci à mes frères de prendre soin des parents en attendant notre retour et merci, immense merci à nos fidèles lecteurs.