Depuis Krasnoïarsk, de Kazan à Novossibirsk

Lundi 30 avril 2018

« Voyager, c’est l’aventure, celle qui laisse des traces dans l’âme »

Et aujourd’hui, c’est ton anniversaire Rémy !

Que de jours passés depuis les tatars.

Alors je repars quelques jours en arrière.

Nous avons quitté le Tatarstan sous un froid sec de -2° à 4° mais nous sommes contents parce que le soleil est de retour.

Nous roulons vers Naberezhnyc Chely au bord du fleuve Kama. C’est fou tous ces larges fleuves dans ce pays. C’est une ville sans charme, là où sont fabriqués les camions Kamaz. C’est un bassin d’emploi énorme et donc la ville est énorme.

Mais divine surprise nous trouvons un mini-hôtel de trois chambres. Etonnant concept très agréable et économique. Notre chambre est lumineuse, d’une propreté incroyable. Le nom doit y être pour quelque chose « Swiss Hôtel » et c’est suisse jusqu’aux prises de courant.

Nous refilons dès le lendemain vers “Y Obarré A”, lire Ufa, la capitale de la Bachkirie, encore une petite république restée dans le giron de la fédération de Russie.

Une route aux allures de piste. On saute, sursaute, tressaute sur une chaussée gondolée et trouée. Ce ne sont plus des nids de poule mais des marmites.
 

On s’arrête grand luxe ce soir tant nous sommes épuisés. L’Holiday Inn au prix d’un Formule 1 de chez nous.
 

En Bachkirie deux langues officielles, le russe et le bachkir et comme nous ne comprenons ni l’une ni l’autre ce n’est pas vraiment gênant.

Entre l’Oural et la Volga, c’est une petite république de collines et de plaines au sous-sol riche en pétrole si l’on en juge par ces pompes qui, inlassablement lèvent et baissent leurs bras. Peintes de couleurs vives comme les maisons aux toits rouge ou vert pétant et c’est une bonne idée de colorer ainsi la terre brune riche des récoltes à venir. Les labours et semis sont faits avant la neige qui reste encore en large plaques épaisses.
 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ufa a son  goum  comme dans presque toutes les grandes villes. Un lieu immense, plein de boutiques et un supermarché. C’est là que nous nous ravitaillons.

Choisir légume ou fruit en lettres de Cyril …

Nous dînons souvent en posant une serviette sur le lit. Pique-nique quoi !

Ce soir-là, à Ufa, nous assistons à une course poursuite d’un jeune par la sécurité. Les hommes de la sécurité ont un flingue et le casque, Outchhh! Il faisait hyper froid, j’ai eu hyper chaud tout d’un coup.

Nous avons maintenant 3 h de décalage avec la France.

Il faut repartir et c’est un défi, une lutte contre nous même. Il fait froid, si froid et la route est décourageante.

Si j’ai le moral en berne, Jean-Luc dit : « eh ! on est là pour notre plaisir » et je me sens mieux. Quand c’est lui qui est brisé de fatigue je dis « eh ! on est là pour notre plaisir » et ça va mieux.

Le mieux c’est de s’arrêter pour alimenter la chaudière pour mieux lutter contre le froid. Un café américano (il y en a partout) et une saucisse chaude ou une soupe et en route …
 

Les distances entre les villes sont gigantesques et c’est parfois compliqué de trouver un logis pour l’étape mais quand on coupe le moteur, quel ouf et quel enthousiasme renouvelé.

Ainsi nous quittons l’Oural méridional sous la pluie, quelle barbe et dès lors nous quittons la Russie européenne.

400 km de désert absolu, comme nous aimons.

Le ciel s’éclaircit, des hautes herbes jaune courbées par le vent, des lacs et des lacs bleus de glace. Il fait 8 ° et des gens pêchent dans le trou de glace.

Et il repleut, pleut sans discontinuer.

Voilà enfin Kargan, une autre ville géante. On tourne, on cherche l’hôtel salvateur. Voie sans issue.
 

Nous sommes dans le quartier des hôpitaux, cliniques, labo, bref que du médical.

Deux jeunes russes, l’un avec des béquilles en bois sous les aisselles et son copain venu le chercher nous viennent en aide.

Je fais le geste dodo les deux mains jointes sur la joue. « Da, da ». Je monte dans leur voiture, Jean-Luc suit à moto. Je me retourne sans cesse pour voir s’il est bien derrière nous.

Et nous voilà à l’hôtel. Accolé à un centre de radiologie et dans la cour d’un vendeur de fauteuils roulants et accessoires, on aurait pu chercher longtemps.

A sent le médicament mais c’est tout propre.

Demain est un autre jour.

Voilà la Sibérie

Dès Ischim nous entrons en Sibérie. C’est la fin de la route européenne 22 qui commence en Grande-Bretagne, passe au Pays-Bas en Allemagne et termine sa vie d’Europe.

A la station-service qui me sert aussi de pause clope (oui, je sais, j’aurais dû profiter du voyage pour arrêter de fumer.) surgissent comme des diables hors de leur boîte des grands gaillards bardés de cuir avec un poignard attaché à la cuisse.
Eh Jean-Luc, tu me vois ? J’ai une trouille terrible. Ah, voilà, je vois mon homme et les gaillards aussi. Ils s’étreignent en frères d’arme et finissent avec des tapes dans le dos. L’un parle anglais.

« Vous êtes crazy, nous sommes aussi motards mais pas maintenant, fait trop froid » « Bravo les français, vous aimez les russes ? »

Et on bavarde ainsi, on sort la carte routière, Jean-Luc montre la route.

Les gars n’en peuvent plus d’étonnement, ils rient. Super moment.

Ils offrent le béret du Che à Jean-Luc qui se doit de le coiffer illico, une bouteille de vodka et un drapeau. Ils disent qu’ils sont les loups de la nuit et nous souhaitent bonne route, grâce à Dieu.

J’ai fait des recherches, c’est un groupe de motards actif en Crimée, politisés depuis 2014. Leur chef est très proche du président et ils sont patriotes orthodoxes et communistes. Vaste mélange.

Et ainsi coulent les jours. Rencontres insolites, éphémères ou rencontre avec nous-mêmes.

La Sibérie dépasse l’imaginaire et il faut voir pour comprendre.

Quand les russes parlent de Russie éternelle, je ressens aussi cela. Un monde d’une solitude et d’un silence si grand qu’il semble figé dans le temps.

Taïga, steppes, bouleaux et l’horizon inaccessible. Oui, c’est ça l’infini…

On comprend pourquoi nul ne s’échappait des goulags. Comment faire ? Il n’y a rien qu’une mer de bouleaux et d’herbes et de neige durant le si long hiver. Tatiana m’a dit : « En Sibérie, si tu survis, si tu t’adaptes, après tu restes. Ainsi, des anciens du goulag ont fait souche, des allemands déportés, des russes dissidents, des ukrainiens déportés etc…puis les ponts sur les fleuves ont été construits, la voie ferrée transsibérienne était là, et d’autres sont venus s’installer.

Ce que Jean-Luc a aimé :

  •  Les shishi fir (?) des minuscules pommes de pins de la taille d’un dé à coudre confites dans sa sève et sucrées
  • Les routes entretenues par la DDE locale
  • Les pains aux raisins parce qu’en roulant un peu le r, en russe on dit pareil
  • Toutes les rencontres magnifiques avec ceux de Novossibirsk (mais j’y reviendrai)
  • Recevoir un échange de fraternité avec les bikers.
  • Les gens qui viennent spontanément lui serrer la main en faisant le signe pouce en l’air de l’autre main.
  • La disparité évidente entre la Russie Européenne et celle que l’on découvre maintenant, très Asiatique !
  • La sensation d’être au ‘Far Est’, des villes qui poussent très vite et maintenant (pour les dernières constructions) de façon harmonieuse.

Ce que Dominique a aimé

  • Quand il faut mettre du carburant, s’arrêter dans une station Gazprom, elles sont propres, y’a des banquettes orange et je peux enlever mes blousons, ma ceinture, mon tour de cou et … aller aux toilettes (je sais c’est prosaïque mais c’est le quotidien !)
  • Discuter à bâtons rompus en français avec ceux et celles de Novossibirsk
  • Manger des saucisses chaudes mais pas au petit-déjeuner.
  • Comprendre, enfin, que culturellement, les gens restent discrets et peuvent sembler réfrigérants sans un sourire (ça ne se fait pas) et voir que lorsque la glace est rompue ils se mettent en quatre pour nous aider et échanger.
  • Et bien sûr, photographier n’importe quoi.
    Les premières fleurs en bord de route
    Les premiers bourgeons
    Pilotis en béton de 10 m de long enfoncés au marteau-pilon.
    Poteau en bois sur pieds en béton.

     

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  • Une berline de luxe d’un autre temps mise sur une stèle

Ce que nous n’avons pas aimé

  • Les stations services où il n’y a que Kacca (une caisse). On glisse 500 roubles dans la boîte à kacca, on se sert, on s’en va. Le préposé derrière sa grille ne dit ni drasvichié, ni dasvidania, ni spassiba. Je ne dis plus rien non plus.
  • Les trous énormes aux sorties des villes, la chaussée défoncée.
  • Etre pris pour des abrutis dans un hôtel miteux au milieu de nulle part, où la dame nous a littéralement claqué la porte de la chambre parce que nous ne comprenions rien de rien. Expérience très désagréable. Revenir un peu plus tard et dire « miam-miam », montrer l’heure et c’est tout de suite ou nada.

Ainsi nous arrivons à Novossibirsk

Et pour ici j’ai mille choses à raconter. Ce sera plus tard parce qu’il est tard ! 5h de décalage avec la France, bientôt 6

 

 

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