Pendant que la moto voyage en train, nous nous promenons de petites villes en petites villes en un grand cercle autour de Moscou que l’on appelle l’Anneau d’Or.
Et, pour se promener, quoi de mieux que le train?
Pas le grand et long transsibérien, simplement des trains qui avancent lentement, s’arrêtent à toutes les gares. Parfois, juste un petit abri, ou un autre un peu plus grand.
Les gens montent, descendent, bavardent, regardent leur téléphone. Une vieille femme squelettique, la tête rasée, chargée d’un sac à dos crasseux monte avec son chien. Elle se gratte, se déshabille et, torse nu, époussette son vêtement. Le jeune chien s’affale dans la travée. Le wagon est plein et nul ne s’assoit à côté d’elle. Des jeunes filles en petit short et mini débardeur gloussent comme toutes les ados du monde. On ne comprend rien mais on écoute, on observe, on sourit.
Le train, comme les nôtres qu’on a connu, siffle et chuinte. La forêt défile et engloutit tout le paysage. Les bouleaux que j’aime tant aspirent toute la lumière et se gorgent de soleil. Je crois qu’ils en font provision pour le rude hiver qui suivra.
On devine parfois les isbas derrière les feuillages, parfois les datchas et leurs potagers à l’orée des villes.
Et quand on prend le train, c’est comme un jeu de piste. Trouver la bonne Kacca, celle des trains et pas celle des bus. Trouver le bon train, le bon quai et la bonne heure. Et, l’on s’aperçoit qu’on lit de mieux en mieux. Les interdictions? Elles sont simples à comprendre avec les pictogrammes.
Et quand on arrive, il faut rejoindre notre hébergement. Bus, taxi ou pied. On se fait rouler dans la farine, une seule fois, ma foi tant pis. 600 roubles au lieu de 100. Nous sommes bon joueur et la somme n’est pas si grosse. La roublardise, ça vient peut-être de là?
Nous avons savouré le temps et de Rostov à Iaroslavl en passant par Alexandrov, nous avons traîné, ivres de coupoles, de bulbes, d’églises, de Kremlins, en une sorte de vertige de beauté, jamais rassasiés, jamais repus, nos regards sans cesse sollicités.
Nous avons fait le choix de passer deux nuits dans un monastère à Rostov.
La nuit dans un silence absolu, une bulle de paix .
Nous avons regretté de ne pas nous faire comprendre et google trad n’est pas parvenu à nous aider. Le soir, croyant vraiment que le « dîner » était prévu, nous allons vers la maison des repas. Elle était close et un jeune devisant avec un pope nous dit de le suivre et nous laisse à l’étage dans une pièce où était dressée une table pour 6 avec en bout, de toute évidence, la place pour un célébrant ( ? !!!).
Les plats simplissimes étaient prêts, les pommes de terre chaudes et il n’y avait personne. Que faire hein ? On n’allait pas s’installer et manger et, vraiment, ça n’avait pas l’air d’être pour nous. Nous avons attendu et nous sommes partis. Diantre ! J’ai appelé le numéro qui était laissé à l’accueil et mon interlocuteur me répond bien fermement : « Dinner ? Niet » et il a raccroché. Il nous restait pour deux, une banane, un concombre et un morceau de fromage à qui nous avons évité de transpirer plus longtemps dans son plastique. Drôle!
Ainsi, les 10 jours ont filé et la boucle est bouclée.
Nous sommes de retour à Sergiyev Posad.
En nous baladant à l’ombre des jardins, écrasés par une folle chaleur, nous nous arrêtons devant le monument du soldat inconnu où brûle une flamme éternelle.
Une cérémonie va commencer. C’est bien de n’être pas pressé. Des soldats de l’armée de terre, de la marine attendent des œillets rouges à la main. Des enfants des écoles aussi, des jeunes filles et jeunes garçons des jeunesses communistes attendent aussi. Il y a la foule, femmes jeunes ou âgées, hommes vieux ou jeunes tous avec trois œillets rouge. Et puis encore le pope de Serguiev, (c’est le chef de l’Eglise orthodoxe de Russie et il vit ici) accompagné de prêtres. Les politiques étaient là aussi, comme le maire de la ville dans son costume bleu qui lui serrait le bide.
Les chœurs de l’armée rouge enflent, sortant des enceintes, la télévision et les photographes sont là. Et commence la cérémonie. Une bénédiction du pope, la chorale des prêtres, un discours du maire et après l’hymne national et le dépôt des grandes couronnes de chaque corps constitué, chacun défile et pose les œillets sur la dalle de marbre où l’air vacille autour de la flamme.
Le politique, la religion, l’armée, l’éducation, tout ce qui tient et compose un peuple en condensé pendant cette heure. Nous avons appris par la suite que ce jour du 22 juin est un jour fêté et non férié: c’est le Jour de la Mémoire et du Chagrin dédié au souvenir du début de la Seconde Guerre mondiale, appelée “Grande Guerre patriotique” en Union Soviétique puis en Russie.
La moto est de retour. Nous sommes allés à Moscou au petit matin, en train. Elle était bien là dans sa caisse si bien construite par Andrei et ses gars.
Repartis à Sergiyev sous 45 °, nous nous tapons au moins trente kilomètres de bouchons en sortie de Moscou, parce que faire passer de 8 voies à 2 pour refaire la chaussée, ça coince! Et nous retrouvons avec bonheur le calme de la petite ville.
Il nous reste 8 jours en Russie, contrainte du visa oblige, nous devrons quitter ce pays qui a si bien accroché nos cœurs.
On dit souvent la Grande Russie, la Russie Eternelle et, pour nous, c’est surtout une immense découverte, d’un peuple qui au premier abord semble froid et indifférent et, passé le premier moment, s’avère si chaleureux et accueillant et aussi d’un paysage hivernal d’une grande beauté et tellement empreint de mélancolie. Et , et, et, je m’arrête là, d’accord ?
Nous remontons en douceur demain vers la frontière russo-finlandaise et ce sera de nouvelles aventures.
Et pour les accros au n’importe quoi, voilà un florilège …
A tous qui, malgré la longueur de notre voyage, continuent de nous suivre, un grand merci de nous écrire, c’est la cerise sur le gâteau.
On vous embrasse, dasvidania et à bientôt.
« Celui qui voyage sans rencontrer l’autre ne voyage pas, il se déplace »
Contente de vous retrouver pour vous raconter tous ces moments jusqu’à notre arrivée à Sergiyev Posad.
Nous avons quitté le Japon et changé tous nos plans.
Nous avons dû faire le constat que pour nous, la Mongolie ne sera pas. Un choix est toujours un regret et, pourtant, nous avons préféré nous attarder au Japon. En Mongolie, les gens appellent le mois de juin, le Mois de Pluie. Nous sommes chargés et s’il est encore possible pour un motard seul sur sa bécane de traverser ce pays superbe, à deux, c’est trop périlleux. Les gués sont si hauts, que les voyageurs en 4×4 ont l’eau jusqu’au capot. Il faut savoir être sages.
Nous repartons en ferry à Vladivostok. Notre bateau avance à 18 nœuds (à peu près 34 km) et les 1200 km nous laissent deux nuits à bord.
Tatiana, nous a évité les tatamis à 72, a parlementé avec les douanes et la moto a pu embarquer chargée. Si nous étions à l’aller 4 motards, au retour, que de magnifiques rencontres. Dix motards coréens de BMW qui partent à Garmisch-Partenkirchen en Allemagne, descendent en Italie par les Alpes puis rejoignent le Portugal.
Le plus vieux : 78 ans ! Quel bonheur de le voir et quelle bouffée d’espérance pour nous. Rire et bavardage, ils sont dans une cabine à 8 en face de la notre à 8 aussi. Dans la nôtre, 2 petits français d’une trentaine d’années, baroudeurs en sac à dos depuis plus d’un an et une médecin coréenne qui travaille aussi en Russie (et deux couchettes vides).
On rencontre aussi un motard turc qui roule dans le monde depuis deux ans sur tous les continents. Un homme incroyable au nez camus et une barbichette qui volète dans le vent. Il ne décolère pas de voir Erdogan au pouvoir, élu par la diaspora européenne qui ne vit pas vraiment les préceptes qu’ils imposent aux autochtones. Et encore, Thomas, à vélo. Thomas a un regard bleu d’une grande fraîcheur, il a 34 ans et a quitté la France il y a 22 mois, sur son vélo. Aujourd’hui, il ressent le besoin de rentrer et sait que son voyage l’a profondément changé. Et encore James et Katy, deux anglais qui viennent de travailler 1 an au Japon après avoir vécu 3 ans en Inde. En Russie James roulera à moto jusqu’à Moscou et Kathy prendra le train. Et encore (si ça vous casse les pieds sauter directement au paragraphe suivant) un couple en 4×4 sur les routes depuis 3ans. Eux vont en Mongolie.
Et encore et surtout Katsura Qi un motard japonais. Katsura est tout petit, les yeux myopes derrière ses lunettes rondes et le sourire accroché dans son regard. Nous avons tellement parlé. Il est patient avec moi pour que je puisse parler dans mon anglais précaire. Jean-Luc et lui échange plus facilement. Il part pour deux mois sur sa petite moto sur la route de Magadan. Nous avions songé à cette route qu’on appelle aussi -la route des os- parce qu’elle a été tracée par les bagnards des goulags et des milliers de déportés sont morts à la tâche. La route est très au Nord, c’est une piste d’ailleurs.
Katsura a roulé dans le monde entier. Il a une femme qui reste à la maison pour s’occuper de leurs chiens et parce qu’elle n’aime pas la moto. Nous avons parlé de l’écriture qui nous est si hermétique. Ainsi quand il a écrit nos noms en expliquant que chaque syllabe correspond à un symbole, je me suis sentie heureuse de voir que mon nom s’associe à la terre, à la mer, à la route. Que celui de Jean-Luc est associé à l’épi de blé nourricier, à l’espérance, à la paix et la sécurité.
Les heures filent vite ainsi sur le ferry et si, quand la houle s’est levée, secouant le bateau entre roulis et tangage, la pluie giflant les ponts, mon estomac n’a pas résisté… Sea-sick ? a dit Katsura. Premier sea-sick de mon existence… Jean-Luc a mieux résisté. Le lendemain la mer s’était apaisée. Les passagers ont pour la plupart rejoints leurs tatamis et d’irréductibles coréens sont restés au pont inférieur à lever des toasts sans discontinuer.
En arrivant à Vladivostok, Svetlana la jeune femme faisant le lien douane a retrouvé tous les motards et 4×4, Youri, qui bosse avec elle, a conduit toute la troupe dans leurs hôtels respectifs avec un RV pour le lendemain pour récupérer les motos.
Le lendemain, les grands vivas ont salué chaque moto qui sortaient de la douane (au Japon, chacun entre et sort sa propre moto du ferry, en Russie, c’est niet, un préposé sort la moto de l’espace des douanes). Et puis, accolades et poignées de mains et chacun a repris sa route. J’ai eu la gorge serrée de voir Katsura enfourcher sa moto et agiter la main.
Au Japon, nous avions pris notre décision et nous avions posé, pesé nos choix. Nous ne referions pas non plus la totalité de la transsibérienne ; le temps permis par le visa nous est compté et nous n’arrivons pas à savoir le réel état de cette fichue route entre Vladivostok et Irkoutsk, surtout autour de Chita et Oulan-Oude où les avis divergent.
Alors, on a trouvé un vol Aéroflot à mini-prix. 8h30 de vol entre Vladivostok et Moscou.
A Vladivostok, nous avions trouvé Andrei qui a mis la moto dans le train. Elle arrivera dans quelques jours.
Et nous pendant ce temps ? Nous nous baladerons dans les toutes petites villes de l’anneau d’or. Villes médiévales dans la Russie rurale. En train et à pied.
C’est vraiment la bonne option et nous nous réjouissons d’avoir, pour une fois, anticipé. Parce que, ici, c’est la coupe du monde de foot. Et qui dit foot, dit businesse. Les prix flambent, se multiplie par presque 100. (Un p’tit appart à Moscou banlieue par Airbnb que nous avions choisi passe le surlendemain après un mail de la jeune femme qui nous le louait de 1 500 roubles à 120 000. On a annulé et Airbnb a remboursé sur le champ, ouf). Toutes les villes où se jouent un match sont inabordables. Quel bonheur d’y être passé dans la froidure et la tranquillité de l’hiver qui ne finissait pas. Mais ne nous leurrons pas, la ‘liesse populaire’ qui nourrit les journalistes, à moins que ce ne soit le contraire, n’existe qu’à la télévision et en cherchant bien qu’autour des stades où sont organisées les rencontres. A Vladivostok, comme à Irkoutsk, ou encore ici à Sergiyev Posad pas de grands panneaux publicitaires et à peine de ventes supplémentaires de drapeaux russes. Mais on s’en fout, ailleurs (c’est-à-dire là où nous sommes), du coup les hébergements sont bradés et ça nous va bien !
A Moscou, une femme adorable qu’on a rencontré dans la navette aéroport, nous a pris sous son aile et à fond de train nous a conduit à la bonne gare. Elle ne parlait pas un mot d’anglais, marchait à toute vitesse, se retournait pour voir si nous suivions bien (on peinait avec nos sacs de moto pas du tout adaptées au transport en jambes). Elle voulait même payer les tickets de métro, mais niet, spassiba quand même… Les gens sont vraiment chaleureux et généreux.
C’est ainsi qu’après 8h30 de vol, 40 minutes de navette aéroport-gare de Kiev, ( c’est à Moscou hein !), 30 minutes de métro (ligne 5, vous savez, celles qui a les fameuses stations) 1h30 de train, et 8 heures de décalage horaire nous voilà à Sergiyev Posad. Ouf!
Sergiyev Posad
Le charme de la Russie a opéré une nouvelle fois. S’il faisait encore frais dans l’Extrême-Orient russe, ici, l’été est là.
Quel changement ! Je suis stupéfaite de la rapidité avec laquelle la nature se dépêche de croître, d’étirer son feuillage dans le ciel bleu. A l’aller j’étais en amour devant les bouleaux nus et scintillants, la glace et la neige. Tout était enveloppé d’une sorte de nostalgie douce.
Aujourd’hui, le vert rutile, les maisons cachées derrière leurs palissades deviennent encore plus invisibles sous les feuillages. Le train s’arrête dans la forêt : un quai, un banc, une gare minuscule. Et enfin, notre arrêt qu’on a failli le louper d’ailleurs.
La forteresse fortifiée du monastère Troitse-Sergiev, la Laure de la Sainte Trinité-Saint Serge, (centre spirituel orthodoxe du XIVe siècle, inscrit au patrimoine de l’Unesco. ) des bulbes qui flamboient, des coupoles turquoises, des maisons de bois, un lac bleu vert, des bouleaux qui bruissent dans la légère brise, des envolées de popes et de nonnes, la fontaine où l’eau est sacrée et, une émotion profonde de m’apercevoir que l’on a quitté le shintoïsme pour retrouver la même ferveur chez tous ces pèlerins orthodoxes et que les dieux sont tellement les mêmes partout que les chinois en visite font les mêmes gestes pieux avec l’eau qui coule des branches de la croix plantée dans la fontaine bleue.
Je n’ai pu rentrer dans les églises sans foulard, alors on en acheté un pour demain…
Je ne sais pas comment retenir les heures qui glissent entre les doigts.
Je ne sais pas comment garder en mémoire ces instants enroulés de magie.
Ecrire, grave les heures, les rencontres légères, éphémères et pourtant si intenses.
Parfois, je me dis que je ne pourrais jamais rentrer, et puis, je pense à nos enfants, à nos petits-enfants, à nos parents si fragiles et je sais que nous rentrerons.
Ce que nous avons aimé
Bavarder avec les motards du monde entier.
Réaliser que tant et tant de gens voyagent, apprennent et ouvrent les yeux en grand pour sortir d’une zone de confort si sécurisante et parfois avec si peu de moyens.
Nous sentir tout fier que le jeune Turk nous dise que ce sont bien les français (et de tous âges) qui sillonnent le plus le monde.
Que chaque pays contient un univers de culture si différent de la nôtre.
Que le monde est beau, si beau…
Regarder des enfants jouer avec une pelle mécanique dans le sable et ils nous disaient tout un tas de choses et on répondait en français et ils poursuivaient sans même se rendre compte que nous ne comprenions rien. C’était drôle.
Photographier n’importe quoi, tous les deux maintenant.
Ce que nous n’avons pas aimé :
Il faut se creuser la tête !
Avoir le mal de mer.
Etre accusé du vol de la télécommande de clim dans l’appart loué à Vladivostok, au retour du Japon, ne pas s’être aperçu qu’il y avait une clim et a fortiori une télécommande. Payer 1000 roubles pour un méfait inexistant, comprendre que c’est de l’arnaque (c’est queue dalle 1 000 roubles) et ne pouvoir argumenter par défaut de maîtrise de la langue et surtout par manque de temps pour ne pas rater la navette aéroport.
Et pour finir, après cet fin d’hiver si âpre, si rude, si glacée sur notre route sibérienne (nous en avons même la nostalgie, déjà!), nous trouvons une Russie verdoyante, tiède, comme si nous découvrions un nouveau pays.
Maurice, tu as raison il faut faire le chemin dans les deux sens pour en extraire toute la quintessence .
A bientôt fidèles lecteurs-suiveurs-commentateurs. Nous vous embrassons, tous.
Sakaiminato n’est pas seulement le plus grand port de pêche de l’ouest du Japon, ce n’est pas seulement le port d’où part le ferry qui nous ramène en Russie, c’est aussi la ville où à vécu le célèbre mangakaMisuki Shigeru. Nous n’y connaissons rien en mangas et pour tout dire ça ne m’a jamais attiré. En plus, c’est le fondateur des mangas d’horreurs, des monstres et des fantômes (on dit yokai, tengu, kappa) (voir wiki)
Pourtant dès que la pluie, qui tombe en hallebardes ce matin, envisagera de cesser nous enfourcherons nos vélos pour aller dans la rue principale célèbre pour ses statues de bronze qu’on déniche comme un jeu de pistes et dont chacune représente un personnage célèbre des manga de Misuki. (C’est le guide qui dit). Mise à jour : nous avons bravé le risque d’être trempés et avons enfourché les vélos, nous ne regrettons pas le voyage !
Ça ne vous dit rien ?
Ce fut un festival de n’importe quoi!
Ca, c’était aujourd’hui.
Pour le reste, nous ne pouvions pas quitter Kyoto sans aller admirer sa grande gare d’acier et de verre construit par un architecte nippon célèbre dont j’ai oublié le nom. Jardins suspendus au 10ème étage, boutiques de luxe, et des multitudes de restaurants dont les devantures proposent mille menus en plastique plus vrai que nature.
Voici 30 secondes de zénitude …
Ici, lèche-vitrine a peut-être tout son sens, mais ça reste quand même du plastique!
Jean-Luc s’est revu devant le jeu vidéo des Lemmings.
Petite leçon de maintien et de bonne conduite féminine captée sur les écrans géants de la gare, les seules geishas que nous aurons vu …
Et surtout, n’oublions pas le Shinkansen!
…
Puis il faut partir en douceur, alors nous choisissons une fois encore la route de la montagne, luxuriante, vert profond, aux villages blottis dans les creux de vallées. Il a plu sans interruption toute la journée mais il faisait doux comme une pluie tiède. Jean-Luc m’avait réservé une jolie surprise. Dans un hotel-onsen perdu sur le flan de la colline nous attendait un dîner gastronomique japonais. Merci, merci.
Cà, c’est le onsen des dames
… et çà, c’est à vivre!
Une présentation éblouissante, d’un raffinement si parfait que nous ne savions pas par quoi commencer. Un serveur prévenant est venu nous expliquer chaque plat, chaque mets, chaque sauce et tel mets est à marier avec telle sauce etc.
Mes yeux et mes papilles n’oublieront jamais. Certains mets ont été pour moi détonants ! Le truc qui ressemblait à une méduse rose et le joli bol avec un truc qui ressemblait à une giclée de sperme géante qui filait entre mes baguettes ! En revanche les lamelles de bœuf de Kobé étaient fondantes à souhait et j’étais heureuse de goûter cette viande si précieuse dont j’avais vu un reportage sur Arte.
Je laisse la place aux photos qui mieux que mes mots montreront ce raffinement.
En conclusion
Ai-je, avons-nous aimé le Japon ?
Les japonais sont très accueillants, très aimables, très souriants, très polis, très raffinés, très élégants, très respectueux, très serviables, très prévenants.
Le japon est très propre, organisé, policé, strict, beaucoup d’injonctions, déférentes certes, mais incontournables, beaucoup d’interdictions et peu de place à l’imprévu.
Une chouette rencontre avec Phil, un français de deux parents japonais installés à Paris. Lui ne parle pas japonais, il vit et travaille en Australie. Il est à Kyoto pour son travail (en anglais) et il disait que les japonais ne se rendaient pas compte de l’effort qui leur est demandé sans cesse. Ils travaillent de 9 h à 22h ou 23 h et ils considèrent que c’est normal : travail, travail. Phil rajoute que les rencontres sont impossibles en dehors du travail puisqu’il n’y a que peu de temps pour le repos, les soirées, les loisirs. Donc les couples se forment dans l’entreprise et le patron est content, c’est même souvent lui qui va gérer les autorisations de grossesse!
J’ai lu que c’était un pays élitiste, où la compétition commence dès la maternelle souvent par un entretien d’entrée avec tests; on a vu que l’école était sur 5 jours et demi.
Alors, je dirais que pour un touriste, le Japon est un rêve, un pays déconcertant qui bouscule notre culture avec plaisir. Mais y vivrais-je ? Je ne crois pas, j’aime trop le bazar, le fouillis, le brouillon râleur de mon pays.
Alors voilà, on racontera de vive voix ce qui nous reviendra à l’esprit sans perdre de vue que presque trois semaines au Japon ne nous fait pas connaître le pays et d’autant plus que nous avons choisi de rester dans le Kansai si montagneux et beau lors que le pays à mille facettes.
Cette fois, pour de vrai Sayonara.
Sans oublier une série de n’importe quoi !
D’abord le coin fumeur!
Ensuite, le bac à promenade des enfants de la crèche.
C’est ce qui saute aux yeux quand on arrive au Japon. Tout semble parfait, si propre et étincelant que si on marchait pieds nus, ils resteraient propres.
J’ai lu qu’un Pokemon quand il est content dit « pika, pika », en fait ça veut dire « immaculé ». Parce que la propreté dans l’échelle de valeur est « bien ».
Les camions brillent, les autobus et les bornes à incendie aussi. Tout ce qui est en chantier ou en construction est caché derrière de larges panneaux blancs coulissants. Si on jette un œil dans l’interstice, on voit le grutier qui bosse en chemise blanche. On voit aussi des hommes à genoux sur un trottoir impeccable qui grattent à la brosse métallique une trace de chewing-gum jeté par un impoli. Inutile de dire que fumer est encore plus impossible qu’en Russie mais il y a des coins fumeurs de temps à autre et, paradoxalement il y a beaucoup de restaurants fumeurs.
Il ne faut pas s’imaginer que les japonais sont parfaits. En roulant dans la montagne, j’ai vu des ravines de déchetteries sauvages. Pourtant, tout est si ordonné, policé, organisé qu’il reste peu de place au hasard.
Cette propreté ahurissante pour nous occidentaux fait partie de la culture nippone qui accorde une place particulière à la purification depuis l’origine du shintoïsme. Je fais un parallèle avec les indiens pour qui purification et propreté vont de pair, sauf que chez eux, ils balaient et nettoient devant leur maison et repoussent les déchets chez le voisin.
Au Japon, c’est une notion de groupe, de communauté, de respect de soi et des autres. Les sento (bain public) et les onsens (source d’eau chaude) relèvent du rite de purification tant du corps que de l’esprit. Finalement un hygiénisme culturalisé.
Quand on rentre dans un appartement ou une petite boutique (en sont exemptés les galeries marchandes et les grands magasins) on enlève sur le palier intérieur ses chaussures. Dans notre studio, c’est l’équivalent d’une marche et nos godillots de motos y prennent toute la place.
Un petit aparté pour les chiens : aucune déjection canine et nulle part, même dans les parcs. Les propriétaires promènent leurs toutous en laisse avec le sac en plastique et la bouteille d’eau. Chien fait pipi sur le trottoir, hop, on rince avec la bouteille, il fait caca, hop le sac ad hoc qui rejoint le plus grand sac plastique qui lui sert à ses propres déchets (mouchoirs en papier, bouteille d’eau vide, tasse en polystyrène etc.)
La salle de bain de notre studio, minuscule, s’utilise comme suit : s’assoir sur un petit tabouret, se savonner en totalité, se rincer soigneusement et ensuite s’installer dans la baignoire, profonde mais courte, les genoux repliés sur la poitrine et tremper ainsi en méditant. L’eau de la baignoire doit rester pure et transparente, peut servir à plusieurs membres de la famille en commençant par le plus âgé et être utilisée plusieurs jours en la couvrant pour maintenir la température de l’eau. Jean-Luc dit que c’est comme une piscine d’appartement.
Fait-on ainsi ? Bé non. On se douche comme chez nous et on ne rentre même pas dans la baignoire (bouhh les vilains)
Et les toilettes ? On y passerait sa vie ! abattant chauffant, jet d’eau correspondant aux orifices qu’on veut nettoyer, plein de boutons à utiliser.
Je laisse intacte votre imagination !
P n°2 comme Poubelles (on dit gomi)
Alors là, je peux vous dire que nous nous sommes interrogés.
Il n’y a aucune poubelle dans les rues. Chacun est responsable de ses cochonneries. Certains mettent leurs menus déchets de la journée dans un sac en plastique et dans le panier du vélo. On trouve quand même devant les kombinis (supérettes) des poubelles de tri.
Le ramassage des ordures est quotidien. Dans des sacs transparents. Nous n’avons pas trop compris le tri puisque le verre va avec le carton. Pour le plastique, c’est à part. J’ai lu qu’on triait en fonction de ce qui est combustible et ce qui ne l’est pas. Alors le verre ? On dit que les japonais sont les champions du recyclage. Les poubelles sont nouées puis placées sous des filets bleus arrimés sur le trottoir ou dans des conteneurs d’une blancheur éclatante et verrouillés. Tes ordures ne sont pas mes ordures, non mais !
Pourtant, s’ils sont champions du recyclage, l’écologie en prend un sacré coup. Comme tout est emballé très élégamment, on se retrouve avec une multicouche d’emballages. Nous cherchions une plaquette de beurre et la trouvant enfin elle est emballée dans un carton décoré, sous le carton, une boite en plastique et pour être vendue encore un plastique. Ainsi, chaque fruit est emballé soigneusement, chaque aliment idem.
Dans une société fortement industrialisée et urbanisée, se débarrasser des déchets est un réel problème et les japonais en matière environnementale ne sont pas très bien classé. J’ai lu que, à l’est de la mer intérieure de Seto il y avait une île déchets, que le gouvernement a conscience du problème et que l’objectif zéro déchets comme il en existe dans certaines petites villes devraient s’étendre à tout le Japon.
P n°3 comme politesse
Une politesse qui après l’âpre et austère Russie nous a fait un immense plaisir. Même si c’est une politesse de façade, c’est surtout un code de conduite que nous avons bien oublié dans nos pays. Un savoir vivre et un savoir être très plaisant mais aussi pour nous deux la crainte de commettre des impairs. Enfin, on sait quand même que l’on salue le buste droit, pour Jean-luc les mains à plat de chaque côté et une inclinaison de tête, pour moi, les deux mains sur les cuisses et une inclinaison de tête.
J’ai lu aussi qu’on ne dit pas sayonara si célèbre parce que ce mot n’est pas bon et même si les japonais nous pardonnent facilement, eux ne l’utilise pas parce que c’est comme -adieu- et ça coupe le lien entre les êtres. On dit « dewa ogenkidé » qui prend le sens de à la louche « au-revoir, prenez soin de vous jusqu’à notre prochaine rencontre ». Vrai ou pas ? Le jeune d’ici dit sayonara.
Google trad nous proposait moshi-moshi pour bonjour et bé non, ça, c’est comme allo au téléphone. On dit Ohayo le matin jusqu’à 11 h, Konnichiwa l’après-midi.
Merci, c’est aligato suivi de quelque chose qui change à chaque fois et que je n’arrive même pas à prononcer. Mais aligato va très bien et on s’aperçoit que dans tous les pays ne dire ne serait-ce que quelques mots fait plaisir aux gens.
G comme gastronomie A vos baguettes!
Nous allons au restaurant ou on mange chez nous après avoir fait notre marché.
Tout est poésie, les couleurs, la présentation, les formes et c’est si joli que parfois, j’ai l’impression de casser un édifice d’art.
Si nous avions des réticences à manger du poisson cru et des algues, c’est fini parce que c’est délicieux. Le palais est maintenant prêt à recevoir n’importe quelle saveur sauf le wasabi que décidément nos papilles ne veulent pas. Pas pour son piquant, les épices, on aime mais pour son goût.
Bon, si Jean-Luc mange depuis longtemps avec aisance en utilisant ses baguettes, je regrette souvent ma main droite indienne qui tripatouillait allègrement mon riz.
Pour savoir si un restaurant est ouvert, c’est facile, il y a des petits rideaux à mi-hauteur, qu’on appelle norem. S’ils pendent, c’est ouvert et il suffit de soulever pour se laisser surprendre.
On mange du poisson et c’est normal dans un archipel, du riz, des algues toutes différentes, certaines au gout d’épinards, des nouilles, épaisses, fines, blanche ou ivoire, des œufs, des trucs frits légèrement. Rien n’est gras, tout subjugue. Et on reste interdit devant le choix. Quand il y a une image ou une représentation plastique c’est simple, quand le troquet est tout petit, on y va au pif et c’est bon. Tout est frais et sain, ça se sent, ça se goûte.
Jean-Luc qui déteste le poulpe se laisse séduire par les fines tranches trempées dans la sauce okonomiyaki (j’ai recopié hein faut pas croire !)
Pour les nouilles, c’est fou le choix : ramen, soba, sonem. Les japonais font « slurp » en aspirant leurs nouilles et ça veut dire que c’est bon. Je fais slurp aussi mais c’est parce que je galère avec mes baguettes.
On s’achète aussi des bento (c’est la gamelle que prépare la mère ou l’épouse pour midi) mais qu’on trouve maintenant partout dans les kombinis. Nous avons au bout de notre ruelle un Family Mart, bien pratique.
Tout est si joliment présenté qu’il est finalement impossible de se goinfrer pour ne pas abîmer ce bel agencement.
Ce qui me manque, nous manque, ce sont les fruits si chers. 8 euros les 9 fraises. 1 euro la banane, et tout ainsi. La salade aussi est chère et les tomates pfiuuuu : 2 tomates 4,5 euros. Le fameux concombre poilu n’est pas un concombre mais un légume dont on ne mange que la peau et qui a une terrible amertume. Mais y’a les glaces à tous les parfums et même au … wasabi !
C comme carpe.
Les carpes sont très emblématiques. Les carpes Koi arborent des belles couleurs rouge mouchetée de vermillon, on les voit autour des temples dans les étangs. Porte-bonheur ou symbole d’amour et de virilité, elles sont très prisées par les collectionneurs.
On voit des bannières qu’on appelle koinobori (j’ai cherché) en forme de carpe en l’honneur de la fête des garçons pour qu’ils héritent des vertus de la carpe.
Une carpe portant la vertu de virilité ! ça me fait rire. Aujourd’hui c’est en l’honneur de tous les enfants dont la fête est début mai, voilà pourquoi nous avons vu des bannières de carpes oubliées.
J comme jardin en incluant les forêts.
Dans l’agitation et la foule extrême, les jardins sont à mon sens des nécessités, des havres de paix et de tranquillité. Souvent minimalistes et bien ratissés, toujours harmonisant les formes et les couleurs. Nous avons aimé marcher et nous reposer. Peut-être, les japonais ont-ils besoin de ces espaces de vide et de calme pour supporter l’urbanisation galopante? Peut-être? …
Et maintenant
Ce que Jean-Luc aime
L’astucieux système sur les fils électriques pour empêcher les oiseaux de se percher
Les pare vues de chantier
Les ouvriers qui, le soir, lavent chacun de leurs outils avant des les ranger dans une boîte elle-même lavée. La toupie à béton est aussi rutilante que si elle était neuve, la pelle de la grue est impeccable
La politesse de tous et les sourires si faciles
Le riz qui colle mais pas comme celui que je fais quand j’ai oublié le temps de cuisson.
Le charme des femmes et hommes en kimonos
La sobriété en tout toujours
La beauté des jardins et des temples
Ce que Dominique a aimé
Les chaussures des ouvriers et jardiniers comme des guêtres ou comme une deuxième peau avec trois orteils-deux orteils à moins que ce soit un orteil-quatre orteils.
La démarche à petits pas des japonaises quand elles portent des geta (tong en bois épais)
Etre intriguée et n’avoir pas de réponse pour toutes ces jeunes filles et femmes qui portent des chaussures (mocassins, à talon, baskets ou autre) qui ont l’air d’avoir une pointure en trop. Promis, j’ai bien regardé, on pourrait glisser un doigt entre le talon et la chaussure
Les Yukatas, sorte de kimonos qui n’en sont pas, tout fleuris et colorés.
Les sushis parce que ça s’attrape facilement avec les baguettes. Tiens, au fait, il parait qu’à certains endroits on mange le poulpe vivant et que ces ventouses se collent au palais !
Les parapluies mis à la disposition de chacun, quand la pluie s’abat, devant les boutiques et magasins.
Les voitures chihuahuas, celles en jaune surtout.
Les minuscules ruelles aux maisons bordées de pots de fleurs
La beauté des jardins et des temples
Photographier n’importe quoi et Jean-Luc s’y met aussi
Ce que Dominique n’aime pas
Le Wasabi
Que le propriétaire me salue à chaque fois que je sors fumer au coin fumeur et à chaque fois que je rentre. (Du coup je fume moins !)
Les vélos qui m’arrivent dans le dos et en règle générale tous les vélos en tout sens parce que je ne sais jamais de quel côté me mettre
Me sentir saturée de l’agitation et des foules dans la ville.
Me dire que je ne connaitrai qu’une si infime particule de ce pays fascinant (oui, je sais, n’est-ce pas déjà une chance inouïe que d’être là?).
PS:
Ce petit blog que nous écrivons à quatre mains est conçu pour notre famille et nos amis mais aussi pour nos mémoires qui déraillent ou défaillent.
Nous n’avons pas indiqué les noms et les lieux des temples, jardins, montagnes etc.. pour deux raisons :
La première : il faudrait s’astreindre chaque soir à noter des noms pour nous difficilement prononçables.
La deuxième : tous ceux qui envisagent, qui rêvent ou organisent un voyage au Japon sauront fort bien trouver guide, forum dédié et blog spécifique à ce pays.
Notre grand plaisir et de partager ce qui nous enchante, de ne jamais porter un jugement hâtif ou définitif sur les pays que nous traversons tellement conscients que nous n’en percevons qu’un fragment. Nous croisons une infinité d’hommes, de femmes, d’enfants pour qui nous sommes des gaijins (des étrangers) et qui chaque jour nous apportent aide, sourires et gentillesse.
Un voyage au long cours est émaillé de moments intenses, de temps qui s’étire, nous n’avons rien à chronométrer, à programmer avec une date fixe, c’est une chance.
Nous sommes ravis et heureux de vos commentaires, de vos courriels, des appels Messenger et WhatsApp. Joyeux de vous lire, aligato.
On vous serre tous dans nos grand bras.
Que Nene et Hideyoshi vous assure le bonheur à tous.
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